Militant anarchiste. Auteur-compositeur, parolier de talent et écrivain.
Fils des militants libertaires espagnols Antonio Roda Vallés et Leonor Gil Garcia. Esteva (francisé en Etienne) est né le 1er août 1941 au camp d’internement de Septfonds (près de Montauban, Tarn-et-Garonne) où ses parents étaient détenus. Au début des années 50, la famille Roda Gil vient se fixer en région parisienne à Antony (Hauts-de-Seine). Après des études au Lycée Henri IV, Etienne est convoqué en 1959 pour aller faire son service militaire en Algérie. Il décide alors de partir pour l’Angleterre et, faisant valoir son statut d’étudiant et obtient finalement un sursis. A Londres, il rentre en contact avec les milieux libertaires espagnols et participe aux activités anti-nucléaires du Comité des 100 de Bertrand Russell, il découvre également le rock’n’roll. A son retour en France, il travaille un temps comme professeur d’espagnol puis comme visiteur médical pour un laboratoire pharmaceutique.
Il milite au sein du Mouvement libertaire espagnol, en exil en France, et particulièrement à la Fédération Ibérique des Jeunesses Libertaires (FIJL). Il participe également, en 1961, au Congrès de réunification de la CNT à Limoges. Durant l’été 1963, il prend une part très active à la campagne de soutien aux compagnons Joaquín Delgado et Francisco Granado (qui seront finalement garrottés à Madrid le 17 août 1963, pour un attentat qu’ils n’avaient pas commis). Dans les années 1966-1967, tout en fréquentant les réunions de l’Internationale situationniste, Etienne sera l’un des fondateurs avec Michel Frantz des Jeunesses anarchistes communistes (JAC). Il collabore à son organe Arcane (6 numéros parus entre janvier 1967 et octobre 1968). Répétiteur d’Espagnol à la Sorbonne, Etienne fréquente le café L’Ecritoire où se réunissent les militants de la JAC du quartier latin et le petit groupe anarchiste du Lycée Louis-le-Grand. C’est à L’Ecritoire qu’Etienne, qui écrivait depuis l’adolescence, rencontre le chanteur Julien Clerc, dont il allait devenir le parolier.
Il participe activement aux évènements de Mai 68, et notamment à la nuit des barricades, le 10 mai, faisant partie des derniers défenseurs de la rue Thouin près de la Contrescarpe. Il tentera ensuite de relancer la CNT (française) et participera, notamment avec Roger Veinante, à la fondation des Jeunesses syndicalistes révolutionnaires (JSR) qui publièrent le journal Action Directe (6 numéros de novembre 1968 à juin 1969).
Engagé chez Pathé Marconi, Etienne n’allait plus cesser d’affirmer ses talents d’auteur-compositeur et de parolier pour un très grand nombre de chanteurs et chanteuses de variétés dont Julien Clerc, Mort Shuman, Angelo Branduardi, Barbara, Vanessa Paradis, Claude François, Malicorne, Johnny Hallyday, Juliette Greco, etc.
Malgré sa notoriété, il ne cessera d’aider le mouvement libertaire espagnol et français, tant par une participation à l’organisation de galas de soutien que par des souscriptions (la plupart du temps de manière anonyme) et par une aide et une solidarité apportée à des compagnons dans le besoin. Il aida également au financement de plusieurs réalisations du mouvement libertaire telle l’édition de livres ou de films (Un autre futur) et aussi, notamment avec Guy Debord et Raoul Vaneigem, à la réalisation du disque de chansons détournées « Pour en finir avec le travail » (1974) où il est l’auteur de l’hymne à « Makhnovtschina ». Après la renaissance de la CNT française, lors des grèves de 1995, il mettait un point d’honneur à participer, chaque 1er mai, à la manifestation organisée par la Confédération et les anarchistes.
Il meurt à Paris le 31 mai 2004 des suites d’une congestion cérébrale.
Outre une discographie de plus de 700 chansons, Etienne Roda Gil est également l’auteur de « Juin 36 » (opéra rock) ; « Café, sang, sucre » (spectacle musical) ; « Ça ira » (opéra).
Il a également fait œuvre d’écrivain avec : « Année 41 » (La nouvelle idéale) ; « L’Ami » (La nouvelle idéale, 1956) ; « La porte marine » (Seuil, 1981) ; « Mala Pata » (Seuil, 1992) ; « Ibertao » (Stock, 1995) ; un recueil de « Paroles libertaires », illustré par Ricardo Mosner (Albin Michel, 1999) ; « Terminé » (Ed. Verticales, 2000).
Extrait de la préface à « Paroles libertaires » :
« La Pensée libertaire n’est pas un fourre-tout où n’importe quel médiocre peut trouver un onguent pour les plaies que la société autoritaire lui inflige. C’est une forme de messianisme sans Dieu qui croit que l’homme est capable de se reconnaître dans son semblable et d’établir par là, avec lui et elle, une communauté solidaire capable d’en finir avec toutes les idéologies. Essayer le paradis, ici... »